La sécurité incendie compte

Déc 24, 2019 | blog, Non classifié(e) |

La révision et la mise à jour des normes de base belges en matière de sécurité incendie battent leur plein. Des exigences ont notamment été définies pour les façades de bâtiments de moyenne et grande hauteur. L’introduction de normes de l’UE, mais aussi certains aspects de conception et de mise en œuvre pour la construction de façades sont proposés et discutés.

Par exemple, le gouvernement veut définir des exigences plus strictes et plus actualisées en ce qui concerne les ossatures secondaires, les tests de façade, la définition des immeubles de grande hauteur et la réglementation des nouvelles constructions. En effet, le tissu urbain et l’architecture ont considérablement évolué au cours des 25 dernières années. Avec les divers incendies dans notre pays et les pays voisins, les exigences de performance énergétique plus strictes pour l’enveloppe du bâtiment et les évolutions en matière de développement urbain, une révision en profondeur est désormais nécessaire.

Nous sommes donc heureux d’apprendre que le Conseil supérieur pour la protection contre l’incendie et l’explosion est parvenu à un accord, y compris sur la proposition de modification de la réglementation en matière de construction (AR) pour les nouveaux bâtiments de plus de 10 m pour les bâtiments de hauteur moyenne et de 25 m pour les bâtiments de grande hauteur. (Référence : 1762 N R3 Conseil supérieur 179, annexe 2.2 Façades – Conception modifiant l’arrêté royal du 7 juillet 1994) Cette proposition a été soumise au ministre de l’Intérieur et sera examinée une fois qu’un gouvernement permanent aura été mis en place.

Défis de la proposition actuelle

La proposition actuelle contient plusieurs initiatives qui auront un effet positif. Les trois éléments suivants sont essentiels pour mettre certaines choses en pratique.

  1. Utilisation de la classification européenne pour l’évaluation de la réaction au feu des matériaux
  2. Tests de façade à grande échelle
  3. Rénovation de l’enveloppe1. UTILISATION DE LA CLASSIFICATION EUROPÉENNE

La classification européenne des réactions au feu des matériaux prévoit divers tests, allant de l’ininflammabilité aux tests d’évaluation de la propagation du feu, de la fusion et du dégagement de fumée. La méthode OIF (test de l’objet isolé en feu, EN 13823) est utilisée pour les matières fusibles peu sensibles à sensibles. Ce test est effectué à petite échelle et ne convient donc pas directement à l’évaluation des incendies hors de contrôle ou entièrement embrasés. Il se limite à évaluer le comportement du feu dans les premières minutes au début d’un incendie. En outre, ce test a été développé pour évaluer les produits et/ou matériaux de construction, mais pas un élément de construction. S’appuyer sur la classification européenne « dans son application » comme moyen principal d’évaluer un système de façade est donc incertain. En effet, la réaction au feu de tous les produits de construction sur le marché européen doit déjà être déclarée sans ambiguïté dans le cadre de la conformité CE avec une norme de produit EN reconnue par l’UE. Une réaction au feu dans des conditions d’« utilisation finale » peut en effet s’avérer tout à fait différente de celle des composants eux-mêmes, ce qui peut prêter à confusion. De plus, cette classe d’« utilisation finale » ne s’applique que dans cette structure spécifiquement définie (et testée). Si un entrepreneur apporte le moindre changement à cette structure, la classe de résistance au feu n’est plus valide. Les entrepreneurs rencontrent souvent des difficultés pour trouver la bonne information ou l’information est lacunaire, comme expliqué dans le rapport de la CSTC de septembre 2017 :

 

« Le principe selon lequel l’exigence de réaction au feu concerne le revêtement de façade et éventuellement aussi les couches de matériau situées derrière le revêtement de façade est souvent mal compris par les professionnels de la construction. Il est souvent difficile pour l’entrepreneur de trouver les informations qui lui sont nécessaires (fiches techniques du fabricant, informations relatives au marquage CE, directives d’agrément technique européennes, etc.). Et lorsque ces informations sont déjà disponibles, les données ne sont généralement pas suffisamment détaillées pour permettre de faire le bon choix. »

 Nous proposons de spécifier la classification européenne des matériaux les plus importants de la façade.

  1. TESTS À GRANDE ÉCHELLE

Dans la proposition actuelle, les matériaux inflammables peuvent être utilisés dans un bâtiment de grande hauteur si le système de façade satisfait à un test à grande échelle tel que le test BS8414 ou LEPIR II.

Des travaux sont en cours au niveau européen pour parvenir à une approche harmonisée au-delà des frontières, à la fois en matière de méthode d’essai, d’évaluation et de classification des systèmes de façades. En effet, il est trop souvent constaté que, sur la base d’un test à grande échelle, les matériaux inflammables parviennent à obtenir un résultat favorable, qui semble ensuite se démentir dans la réalité.

Aussi, les régulateurs britanniques et français envisagent d’interdire l’utilisation de matériaux inflammables dans les systèmes de façades de grande hauteur, de sorte que ces matériaux ne puissent plus être jugés conformes pour les bâtiments de grande hauteur selon le test BS 8414 ou LEPIR II.

Nous pensons que l’Union européenne a besoin d’une méthode de test unique de haute qualité reflétant les risques réels pour la sécurité des façades et que, dans l’intérêt général, tous les États membres devraient chercher à se mettre d’accord.

Pour démontrer l’ininflammabilité de la façade, les pièces et/ou composants importants tels que l’isolation et les éléments de façade doivent présenter une réaction au feu minimale A1 ou A2. Si les couches secondaires (écrans anti-pluie, écrans anti-vent, etc.) et les techniques de fixation ne sont pas ininflammables, la conformité à un test à grande échelle doit être démontrée et reconnue par l’ISIB.

  1. RÉNOVATION

Les bâtiments en cours de rénovation doivent répondre aux exigences de sécurité incendie en vigueur lors de la construction du bâtiment. Plusieurs incendies catastrophiques en Europe ont démontré la nécessité d’une réglementation adéquate en matière de sécurité incendie pour les bâtiments en rénovation. Les incendies catastrophiques à Roubaix, Dijon et Grenfell, notamment, sont des exemples de bâtiments récemment rénovés, où la sécurité incendie a été affectée par le système de façade installé.

 

Nous proposons que la réglementation relative aux incendies pour les systèmes de façade de nouvelles constructions s’applique également aux bâtiments en cours de rénovation.

AUTRES RECOMMANDATIONS

  • TIRER LES LECONS DES AUTRES PAYS EUROPÉENS

Sur base de la discussion au sein du sous-groupe de travail, nous sommes arrivés à la conclusion que l’ossature secondaire n’a jamais posé de problème dramatique. Prévenir vaut toujours mieux que guérir ! Nous devons tirer les leçons des accidents dans les autres pays, et ne pas attendre une catastrophe sur notre territoire avant d’imposer des normes plus strictes. Le gouvernement britannique a adopté une nouvelle législation visant à renforcer la sécurité incendie des immeubles de grande hauteur à vocation résidentielle. Le règlement de novembre 2018 interdit l’utilisation de revêtements et d’isolation inflammables dans les immeubles de grande hauteur, les hôpitaux, les centres de soins résidentiels et les résidences pour étudiants de plus de 18 mètres de hauteur.[1]

  • APPROCHE INTÉGRALE CONFORME À LA DPEB 2018

L’accent mis sur la rénovation est désormais d’autant plus important à l’heure où nous recherchons des moyens d’accroître notre efficacité énergétique afin de lutter contre les effets du changement climatique. Les exigences de la directive européenne sur la performance énergétique des bâtiments, abrégée DPEB, qui doit être transposée dans la législation nationale d’ici mars 2020, vont accélérer le besoin de rénovation.[2] Pour les bâtiments neufs et les bâtiments en cours de rénovation majeure, les États membres devraient promouvoir des systèmes alternatifs à haut rendement, à condition qu’ils soient techniquement, fonctionnellement et économiquement réalisables, tout en veillant à une température intérieure saine, à la sécurité incendie et aux risques liés à une activité sismique intense, conformément aux prescriptions de sécurité nationales.

La Région de Bruxelles-Capitale a déjà pris certaines mesures allant dans la bonne direction en actualisant et en affinant la liste des exceptions figurant dans l’arrêté de Bruxelles du 10 juin 2004 [3] sur la base de l’expérience du Service d’Incendie et d’Aide Médicale Urgente (SIAMU).

À compter du 1er janvier 2019, le Service d’Incendie et d’Aide Médicale Urgente (SIAMU[4]) de la région bruxelloise est autorisé à étudier les matériaux de construction utilisés pour la rénovation des façades d’immeubles de moyenne et grande hauteur. La liste des projets nécessitant l’approbation du SIAMU inclut désormais également les modifications apportées aux structures de façade susceptibles de contribuer à la propagation de l’incendie.[5]

RECOMMANDATIONS D’AMÉLIORATIONS :

■ Utilisation de matériaux ininflammables (A1, A2) pour les immeubles à partir de 25 mètres de hauteur et à risque

■ Clarté des méthodes de test et de la classification pour les conseillers des services d’incendie, les prescripteurs et les opérateurs

■ Nouvelle réglementation incendie aussi d’application pour les rénovations

le 28 octobre 2019

[1] UK Building (Amendment) Regulations 2018

[2] DIRECTIVE (UE) 2018/844 DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL du 30 mai 2018

[3] Arrêté du Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale du 10 juin 2004

[4] Demande de conseils relatifs à la prévention des incendies SIAMU

[5] Modification Arrêté du Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale du 18 octobre 2018

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